
Un chiffre brut, sans appel : le secteur des transports représente près d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre en France. Impossible de faire l’autruche : le modèle du tout-pétrole appartient au passé. Face à la multiplication des alertes climatiques, la question n’est plus de savoir s’il faut changer, mais comment accélérer une transition qui reste, pour beaucoup, un défi logistique et politique. La France a tracé sa feuille de route. Avec la Loi d’orientation des mobilités (LOM), la vente de véhicules thermiques fossiles prendra fin d’ici 2040. Crit’Air classe déjà les véhicules selon leurs émissions, et les Zones à Faibles Émissions (ZFE) limitent l’accès aux centres urbains aux modèles les moins polluants. Le signal est clair : chaque acteur doit revoir sa copie, constructeurs, collectivités, usagers. Sur le plan européen, la Directive RED 3 impose un cap : 45 % d’énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’ici 2030. Ce cadre bouscule les filières, accélère l’innovation et conditionne l’accès à certains marchés à la certification des baisses d’émissions. La France, forte de son industrie aéronautique et de son réseau ferroviaire, occupe une position stratégique pour orchestrer cette mutation. Pour y voir plus clair, voici trois dynamiques majeures qui façonnent la transformation du secteur :
- Adopter des carburants issus de sources renouvelables pour sortir de la dépendance au pétrole.
- Rendre la traçabilité et la certification des réductions d’émissions incontournables pour tous les opérateurs.
- Capitaliser sur le poids de l’industrie et des infrastructures françaises pour accélérer la transition à l’échelle européenne.
Quels carburants émergent réellement comme alternatives crédibles ?
Le tri se fait sans détour : seules quelques énergies alternatives s’imposent par leur fiabilité et leur impact concret. Les biocarburants ouvrent la voie. Produits à partir de matières premières comme le colza, les huiles de cuisson recyclées ou les déchets agricoles, ils se glissent dans le quotidien des transporteurs et même dans l’aviation. Le B100, issu d’esters méthyliques d’acides gras, s’installe progressivement chez les professionnels du transport routier. Son empreinte carbone se situe bien en dessous du diesel traditionnel, même si ses rejets de NOx restent plus élevés. De son côté, l’HVO, carburant renouvelable adapté aux moteurs diesel existants, gagne du terrain grâce à des distributeurs comme Total ou AS24, qui multiplient les stations dédiées.
Le Bio-GNV incarne l’essor du biométhane. Issu de la méthanisation de déchets organiques, ce gaz propre alimente aujourd’hui près de la moitié des camions roulant au gaz. Un air plus sain, moins de CO2, et une filière qui s’ancre dans l’économie circulaire : le réseau de stations s’étend rapidement, rendant ce choix de plus en plus accessible.
L’électricité et l’hydrogène symbolisent la promesse d’un transport sans émission à l’échappement. Les voitures électriques, alimentées en France par une électricité à faible intensité carbone, reçoivent la vignette Crit’Air 0. Les véhicules à hydrogène, eux aussi, profitent de cette reconnaissance, portés par des filières industrielles en pleine structuration et une volonté politique affirmée.
Côté aviation, les carburants durables (SAF), développés à partir de biomasse ou conçus grâce à de l’hydrogène vert, franchissent le cap expérimental pour se confronter aux réalités du terrain. Leur avenir dépendra de la disponibilité des ressources et de la capacité à produire de l’hydrogène à faible émission, sans entrer en concurrence avec d’autres usages. Désormais, le choix d’un carburant repose sur des critères tangibles : transparence sur la provenance, certification des réductions d’émissions et compatibilité avec les besoins des acteurs du transport.
Panorama des solutions prometteuses, loin des fausses bonnes idées
Le débat s’est déplacé : il ne s’agit plus d’opposer pétrole et alternatives, mais plutôt d’évaluer, avec lucidité, ce qui marche sur le terrain. Les biocarburants ont conquis le segment du transport lourd. En 2024, le B100 à base de colza est devenu le premier biocarburant homologué pour les camions français. Il permet une nette réduction des émissions de CO2, sans pour autant résoudre complètement la question des NOx. Le HVO, produit à partir de résidus oléagineux ou de graisses animales, attire grâce à sa compatibilité avec les parcs existants et représente désormais près d’un tiers de la consommation mondiale de biodiesel, propulsé par des acteurs comme Total ou AS24.
Le Bio-GNV transforme l’économie circulaire en levier énergétique. Plus de 700 stations, publiques et privées, rendent ce gaz renouvelable accessible à une part grandissante de poids lourds, dépassant les 40 % dans ce secteur. Son impact environnemental, traçable et certifié, convainc autant les entreprises de logistique que les collectivités locales.
L’électrification, combinée à l’essor de l’hydrogène « vert », ouvre la perspective d’un transport propre. Les véhicules électriques échappent aux restrictions urbaines grâce à leur vignette Crit’Air 0 et profitent d’une électricité largement décarbonée en France. L’hydrogène, dès lors qu’il est issu de procédés sans émission, alimente déjà quelques flottes pilotes, comme celles opérées par Hyliko.
Dans l’aviation, les carburants durables (SAF) sont sur le point de redéfinir les standards. Leur généralisation dépendra de la sécurisation des approvisionnements en biomasse et en hydrogène à faible émission, tout en répondant aux exigences strictes de certification. L’industrie avance, portée par les ambitions européennes et la volonté des grands groupes, mais doit composer avec des contraintes techniques et économiques bien réelles.
Alors que les choix actuels dessinent la mobilité de demain, la transition énergétique ne tolère plus l’hésitation. Reste à voir si la cadence de cette transformation parviendra à suivre l’urgence imposée par le climat.

























































